En quelques années, le paysage médiatique a connu des transformations rapides et sans précédent. Des entreprises, des marques, des noms de site ont fait leur apparition et grossi à une vitesse faramineuse jusqu’à imposer leur leadership. Google, fondé en 1998, emploie aujourd’hui plus de vingt mille personnes à travers le monde et a dégagé en 2008 un profit de plus de quatre milliards de dollars (2, 8 milliards d’euros). En juin dernier, l’entreprise Facebook était valorisée à hauteur de dix milliards de dollars, soit 8,34 milliards d’euros. Fin février, on recensait quatre cent cinquante millions de membres sur Facebook (quinze millions en France). Twitter, qui offre un service de microblogage, a été créé en 2006 et faisait l’an dernier l’objet de propositions d’achat de l’ordre du milliard de dollars.
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Qu’en sera-t-il demain ? Personne n’est en capacité de le dire. De nouveaux acteurs émergent, proposant produits et services novateurs. Les technologies évoluent pour proposer une bande passante de plus en plus large, permettant une augmentation faramineuse du trafic (la 3G aujourd’hui et déjà la 4G), et favorisant le déploiement de nouvelles applications (informations, musique, cinéma, jeux en ligne…). Ce qui ne va pas sans d’ambitieux programmes d’investissements et de recherche-développement. Ces évolutions se poursuivront probablement. Jean-Ludovic Silicani, le régulateur français des télécoms, estime qu’Internet et son « écosystème » pèsent aujourd’hui « 6 à 7 % du PIB mondial aujourd’hui, mais 20 % demain » (Libération, 15 avril 2010). Certains annoncent même déjà la mort du web : selon le magazine Wired, les sites web classiques seront bientôt supplantés par les applications utilisant Internet (Alternatives Économiques, 1er octobre 2010).
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Ces évolutions technologiques affectent l’édition et la presse. C’est toute une économie qui est en train de se restructurer, avec de nouveaux équilibres entre les producteurs de contenus, des diffuseurs, des moteurs de recherche et des agrégateurs de contenus. Les enjeux financiers sont importants. L’économie du net suppose de la part des opérateurs des investissements énormes. Mais ce ne sont pas nécessairement les plus gros investisseurs qui tirent leur épingle du jeu. L’avantage est aux agrégateurs de contenus qui ne supportent ni les coûts de recherche-développement et d’infrastructure, ni celui de la production des contenus, mais qui génèrent d’importantes recettes publicitaires. Ce modèle économique pose de délicates questions de droits d’auteur et de propriété (cf. la numérisation des ouvrages par Google). Pourtant il tend à se diffuser. Ainsi le magazine Suite 101 rémunère-t-il ses rédacteurs en fonction des publicités activées par les internautes. Cette expérience est présentée comme une manière de rendre rentable le journalisme numérique. Mais peut-on vraiment compter sur la publicité ? Et est-ce une bonne chose pour une information de qualité que de rester entièrement tributaire des annonceurs ?
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Hier présentée comme une avancée inédite, la gratuité fait l’objet aujourd’hui d’une profonde remise en cause, y compris de la part de ceux qui en étaient les chantres hier. Dans Le Figaro du 14 avril 2010, Maxime Lombardini, le PDG de Free, déclarait : « On ne peut pas mettre des capacités sans cesse plus importantes à disposition de quelques groupes américains sans qu’ils contribuent à quoi que ce soit. » La journaliste commente : « Internet est en pleine crise d’adolescence. […] Le réseau découvre que les idéaux généreux qui le nourrissent depuis ses débuts doivent aussi laisser place au réalisme économique. Arrivant à l’âge adulte, Internet doit désormais apprendre l’art de composer entre son idéal de liberté et d’égal accès au réseau pour tous, et la nécessité d’investir lourdement dans les réseaux face à la hausse du trafic. »
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